mardi 3 février 2015

ÉCOUTER MICHEL-SAMUEL, QUEL PLAISIR...

Du haut de ses 6 pieds, Michel se raconte avec beaucoup de mots. Il veut que je comprenne bien.

Michel est né à Djayeli, au Niger. Il a 18 ans. Ils sont 8 dans la famille. Sa mère vient d'accoucher d'un petit dernier qui s'appelle Toussaint. Michel vit au pensionnat du foyer Samuel et fait des études au lycée classique en vue d'obtenir un baccalauréat. Depuis qu'il est  très jeune, il veut devenir un prêtre. Dans ses loisirs, il suit deux cours de piano par semaine avec moi. C'est sa deuxième année.

Maintenant, voici l'histoire de son père et de sa détermination... Quand il a été en âge de décider de son avenir, son père voulait être cathéchiste. Son grand-père ne voulait pas. C'était un gourdmantché et son fils devait suivre la tradition. Il devait rester à la maison pour travailler la terre et prendre soin de la famille. Alors, son père a décidé de quitter sa famille et de faire une formation en catéchèse. Puis, à un certain moment de sa vie, son père a été engagé pour aider un agriculteur. Comme il travaillait bien, le propriétaire  lui a dit que s'il voulait marier sa fille, c'était possible. Il a accepté. Alors, ils se sont mariés à l'église. Le travail de son père est toujours religieux. Il aide les prêtres en s'occupant de certaines communautés dans la paroisse. Il dirige des célébrations de la parole dans les communautés les plus éloignées qui sont sans prêtre fixe. Il donne des formations en lien avec son travail. Michel a toujours vécu dans une famille très religieuse.


Quand il était jeune, il aimait beaucoup aller à la bergerie. Ses yeux brillent quand il en parle. Il aimait aussi faire des jeux pendant la nuit avec ses amis. Quand il a eu 12 ans, il a dû quitter sa bergerie car il était assez grand pour travailler  la terre et apprendre à s'occuper d'une maison. Pour faire ses études secondaires, son père l'a envoyé chez un oncle en ville. L'école du village étant médiocre, il lui a choisi une bonne école. Présentement, il lui reste une année pleine à faire pour compléter sa scolarisation. Quand Michel retourne au village pendant les vacances, il a un coin de terre à lui. Il cultive du sésame  et du mil. Quand arrive la récolte, ses parents s'occupent de faire le travail car Michel est aux études pendant  cette période. L'argent qu'on ramasse avec sa récolte, sert à payer ses études.


La jeunesse de Michel est teintée de traditions. Par contre, on sent par les mots qu'il y porte aujourd'hui, un oeil critique.


Les traditions...

La pluie...
Son grand-père a le pouvoir de faire venir la pluie. Quand la sécheresse est trop grande, les hommes vont voir son grand-père pour avoir la pluie. Ce dernier fait un feu et mixe des herbes  qui font venir la pluie. Il parle au ciel et la pluie vient. Michel l'a vu de ses yeux quand il était jeune.

Les marques de l'ethnie...
Michel a des cicatrices sur le visage. Il a demandé d'en avoir comme les autres. Aujourd'hui, il regrette un peu ce geste. Ces soeurs n'auront jamais de cicatrice ni le petit dernier. Sa famille est ouverte vers la modernité. Lui-même considère que celles-ci sont d'aucune utilité dans la vie. Par contre, pour les traditionnels, cela permet d'identifier facilement les ethnies.

Les tapeurs de sable...
Ce sont des hommes qui font des dessins dans le sable. Ils écrivent des mots dans le sable. Après, ils font l'interprétation de ces signes. On lit dans le sable, l'avenir.

L'initiation des garçons...
Entre 11 et 18 ans, il y a une grande fête pour eux pendant laquelle on fait la circoncision. Il y a une préparation. La maman et d'autres femmes de la famille lavent le jeune. On lui rase les cheveux. On lui met de la pommade. Ce geste signifie qu'il va sortir de l'enfance pour rentrer dans le clan des grands. Puis le chef de l'initiation appelé Nani vient chercher le jeune pour l'amener dans sa maison. Le nombre d'initiés est très variable. Nani fait un sacrifice pour demander la paix et le bonheur pour les jeunes. C'est le forgeron qui fait les circoncisions. Après, on a toujours des médicaments qui proviennent du médecin pour soigner en cas de problème. Ils sont un mois  tous ensemble. À l'occasion, ils sortent pour aller en ville. Ils reçoivent des enseignements sur le rôle de l'homme, le rôle de l'époux. Ils apprennent à chanter et à danser. Après ce mois, il y a une grande fête qui dure trois jours. On leur fait en rasant les cheveux, une croix qui indique qu'ils sont devenus des hommes maintenant. Tous portent les habits traditionnels. On joue du tam-tam très fort pour que les jeune initiés  dansent. Ils reçoivent plein de cadeaux qu'ils peuvent garder. Michel a reçu une chèvre , deux moustiquaires et une somme d'argent. Un ami a déjà reçu un taureau et beaucoup d'argent.

L'initiation des filles...
On continue à faire l'excision même si c'est défendu. Pour les chrétiens, c'est une situation difficile. Ils ne sont pas en accord avec cette coutume. Certaines traditions peuvent être mises de côté sans problème. Par contre, celle-ci, peut placer la  famille en retrait du clan.



Le coeur de Michel est rempli de souvenirs qu'il a accepté de partager avec Tantie Lucie ( ici, tout le monde m'appelle comme cela). Ses paroles coulent comme l'eau d'une source, claire et limpide. Quel plaisir de l'écouter...


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